LA MEDITATION CORPORELLE
Mémoire pour L'Institut Français de Yoga
Essai sur les liens entre la danse et le yoga.
Nous retrouvons dans le yoga la symbolique des 5 éléments fondamentaux. Leur interprétation, à la fois dans l'axe vertical comme dans l'horizontal mais aussi dans les relations entre eux, retracent toute la symbolique du corps humain inscrite dans le corps.
Pour les fondations, les racines, c'est mûla. C'est la stabilité, mais aussi l'idée d'un support, d'une génération, d'une source. Mûla est situé à l'intérieur du bassin et lié au sacrum.
A l'opposé, à l'intérieur du crâne, dans le prolongement du 3ème oeil, se trouve candra, la lune, le nectar de la vie. C'est l'intelligence corporelle, la réflexion, mais aussi le chef d'orchestre qui permet aux autres éléments d'avoir des relations appropriées entre eux.
Si mûla est le réel de notre enracinement, candra est les potentialités.
Entre candra et mûla se trouve sûrya, le soleil qui symbolise la digestion, la transformation, la combustion. Il se situe au plexus solaire, et il est nourri par candra.
Entre sûrya et candra se trouve prãna. Le grand prãna est celui de l'expression et de la réflexion du purusa, le petit prãna est l'énergie qui relie, transforme et attise le feu.
Enfin, apãna est une sorte de prãna situé dans le bas ventre et concerne l'élimination. Il enlève les déchets qu'il va chercher un peu partout dans le corps.
Apãna et prãna travaillent pour l'espace de sûrya, et si l'un prend trop il crée un manque chez l'autre, ils sont liés l'un à l'autre. Apãna nettoie, enlève, élimine, il est lié au passé. Prãna est toujours prêt pour de nouvelles perceptions, de nouvelles actions, il est lié au futur.
Ainsi, l'expiration profonde peut aider à déstocker, éliminer le passé. L'inspiration profonde dans la partie haute du buste, propulse vers l'avenir.
Bien que ces cinq éléments soient localisés dans un endroit, chacun d'eux est présent et actif dans chacune de nos cellules.
Relions maintenant la notion de verticalité dans le yoga à candra et mûla.
"Ces deux pôles tout en faisant profondément partie de nous, sont les deux pôles d'une relation avec une sorte d'au-delà de nous-même. Mûla est le lieu de notre enracinement dans l'humanité, dans quelque chose qui nous dépasse. Il n'est pas dans le temps. Même s'il est le lieu de la stabilité, il touche aussi à nos peurs profondes, celles de ne pas être installé, de ne pas participer, et la peur, selon le Yoga Sutra, est présente même chez les sages.
Candra l'autre pôle, est aussi hors du temps. Si mûla a un aspect d'immanence, candra a un aspect de transcendance. Si mûla est l'enracinement de l'être humain, candra est la participation à un projet de vie plus large que nous-même, un potentiel qui est là dans le corps, une intelligence corporelle qui sait quelque chose sur ce qu'est le corps humain.Fondamentalement, notre vie est dans la relation entre ces deux pôles, une relation qui nous dit que l'être humain participe à un au-delà de son vécu, un au-delà de sa naissance et de sa mort…
Cette relation verticale entre mûla et candra ne peut fonctionner sans sûrya, le feu, le soleil, tout ce qui brûle, purifie, dégage, transcende, transforme. Sûrya rend possible cette relation et est portée par elle : mûla en est le support, candra le carburant, une source d'énergie qui leur permet de brûler. Sûrya ouvre et exprime une relation très profonde entre candra et mûla. Mais cette relation n'est pas symétrique. Le carburant, candra, qui descend et tombe pour nourrir le feu est aussi appelé amrta, la non-mort. Il est comme un élixir de vie qui nous protège, une porte de la vie ou de la mort. Quand cela fonctionne bien, candra donne quelque chose de son essence à sûrya, et lorsque sûrya est bien à sa place, bien porté par mûla, candra peut nourrir le corps pour la vie. Sûrya permet cette relation entre candra et mûla de nous ouvrir au monde, à l'autre, à la perception, à l'instant. Sûrya est alors ce qui nous rend lumineux, prêt à dévorer le monde et à l'assimiler. Il favorise ce qu'on pourrait appelé le mouvement d'incarnation. Mais un tel mouvement peut ne pas être juste. Quand sûrya ne fonctionne pas bien, la relation peut devenir comme un mouvement de survie. Ainsi l'axe candra-sûrya est aussi l'axe du stress. Quand on est menacé, quand on cherche à s'accrocher, à survivre, alors candra coule plus fort pour permettre à sûrya de brûler. L'axe de vie devient l'axe de mort car candra est une source limitée. Tous les problèmes qui font obstacles à cette relation touchent à la vie et à la mort."
Peter Hernsnack, La chair vivante, Les cahiers de présence d'esprit
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